Les explications sont nombreuses, parmi lesquelles un objectif flou et peu rĂ©aliste, un manque de moyens dĂ©diĂ©s, un mauvais bilan sur les ressources dĂ©jĂ en place et celles restant Ă acquĂ©rir, des outils de pilotage et de suivi insuffisants, une communication inefficace …
Mais mon expérience en entreprise m’a permis de m’apercevoir que la première d’entre-elles était la non-adhésion des principaux acteurs au projet.
La dimension humaine est trop souvent sous-estimée.
Or il y a de la complexitĂ© Ă travailler ensemble. Il n’est pas facile d’ĂŞtre chef d’orchestre, mĂŞme avec peu de musiciens. Heureusement tout peut s’apprendre et surtout s’amĂ©liorer.
Au dĂ©part d’un projet, tout commence par un rĂŞve. Les chefs d’entreprises, les crĂ©ateurs, les inventeurs, les bâtisseurs, les artistes le savent bien ! Eux qui mettent toute leur Ă©nergie Ă transformer leurs visions en rĂ©alisations concrètes.
Observons de plus près comment cela se passe en réalité :
Au niveau des décideurs.
Dans les organisations professionnelles, la direction, l’équipe responsable du développement, tous réfléchissent pour améliorer la performance de l’entreprise.
Seul ou à plusieurs, les responsables prennent le temps de mettre les idées à plat. Si ils ont la chance d’être en groupe, ils en discutent entre eux et cela permet à chacun de comprendre les enjeux et les contraintes. Ils prévoient alors d’adapter leurs ambitions et objectifs personnels. Ils prennent un temps pour faire leurs deuils de certaines orientations non privilégiées. Ils évaluent les moyens alloués au projet … Et le groupe avance, les doutes et les craintes s’aplanissent et les résistances peu à peu sont dépassées.
Le temps est laissé à chaque personne de mûrir le projet pour faire en sorte qu’à un moment donné tous soient prêts.
Au niveau des collaborateurs, des services.
Puis vient le temps de la communication, parfois le plan a été travaillé et répété. La direction est dans les starting blocks. Beaucoup de temps et d’énergie ont été consacrés pour en arriver là . Tous sont impatients de pouvoir déployer le projet et de voir les effets positifs, il y a même souvent urgence à voir le retour sur investissement.
C’est le moment où les collaborateurs reçoivent l’information, les explications sur les effets positifs, les opportunités que ce projet va créer.
Que se passe t-il alors dans leur tête ? En réalité, une foule de questions se bousculent. Ils se demandent :
- « pourquoi changer ? »,
- « est-ce vraiment nécessaire ? »,
- «Cela ne va-t-il pas me compliquer la tâche ? »,
- « vais-je pouvoir continuer à exercer mon métier correctement »,
- « mon expertise sera-t-elle toujours reconnue ? »,
- « Pourquoi dois-je changer et pas tous les autres ? Ou le contraire pour les autres et pas moi ? »,
- « Qu’est ce que j’y gagne ? »,
- « Qu’est ce que j’y perds ? »,
- « Puis-je discuter des critères du travail bien fait dans ces nouvelles conditions ? »
- etc.
Si personne ne s’occupe d’apporter des réponses, les questions vont susciter de l’inquiétude, des craintes, des doutes, de la peur ou de la colère. Cela se traduira par des résistances, des tensions, des conflits, parfois du sabotage souvent inconscient.
La maturation est nécessaire à tous les niveaux.
Du temps pour trouver du sens au changement.
Le temps est une ressource au service de l’Ă©quipe pour lui permettre de bien vivre cette transition. Toutes les parties prenantes au projet doivent pouvoir y rĂ©flĂ©chir pour se l’approprier. Le processus est humain. Chacun doit faire son deuil des anciens repères, s’en construire de nouveau. Il faut organiser ce temps dĂ©diĂ© Ă la discussion, voire Ă la controverse, pour rĂ©soudre les problèmes soulevĂ©s par le nouveau projet.
Plus la phase est aboutie au niveau de la direction, de l’équipe de management, plus il est nécessaire de laisser un temps constructif aux collaborateurs pour que ces derniers puissent les rejoindre dans ce projet.
Se poser des questions de transition.
Pour combler le dĂ©calage susceptible de se crĂ©er, lors d’une opĂ©ration de changement, entre une Ă©quipe dirigeante et le reste du personnel, il est souhaitable de se poser des questions :
- OĂą en sont les collaborateurs, les acteurs destinataires du changement ?
- Quel est leur niveau de préparation ?
- Quel sens mettent-ils à ce changement ? Qu’est que cela veut dire pour eux ?
- A quel moment les impliquer pour ne pas tout faire en vase clos ?
- Sont-ils prĂŞts ?
- Qu’avons-nous fait, que devons-nous faire pour qu’ils le soient ?
Le dĂ©ploiement d’un projet n’est donc pas sa phase finale, il en est le cĹ“ur. Ce serait une erreur de penser que cette Ă©tape n’est qu’un dĂ©veloppement facile et un peu secondaire puisque la conception complexe a Ă©tĂ© correctement pensĂ©e en amont par la direction. Il faut repartir du sens de la dĂ©marche pour le personnel. Un accompagnement est nĂ©cessaire.